Langues et communication : pour une pédagogie des têtes bien faites

Publié le dimanche 4 août 2002 par admin_sat , mis a jour le dimanche 5 août 2007

La difficulté d’écrire l’anglais m’est extrêmement ennuyeuse. Ah, mon Dieu ! si l’on pouvait toujours écrire cette belle langue de France !
Charles DICKENS (1812-1870)

C’est une langue bien difficile que le français. A peine écrit-on depuis quarante-cinq ans qu’on commence à s’en apercevoir.
COLETTE (1873-1954)

Apprendre le français, cela n’est point facile. Il ne m’arrive pas une fois sur dix de dire exactement ce que je veux dire.
ALAIN (1868-1951)

Si l’apprentissage des langues étrangères est poussé à fond de manière à profiter à l’esprit, il demande un temps immense. S’il est superficiel, il n’apporte rien à la culture intellectuelle.
Antoine MEILLET (1866-1936)
Professeur au Collège de France
"Les langues dans l’Europe nouvelle"

Un problème qui n’est pas nouveau

1907 :
"Il n’y a aucune témérité à prédire que la solution par l’étude de langues étrangères, toujours plus nombreuses et mieux apprises, aboutira à la faillite. Vainement on s’efforce de la retarder par de fréquents remaniements de méthodes. Elle est fatale, parce que la mémoire a ses limites. Le nombre de personnes capables d’apprendre pratiquement deux ou trois langues étrangères, avec tant d’autres choses, en outre est infime ; or c’est à un nombre d’hommes continuellement croissant qu’il importe de pouvoir communiquer avec des nations de langues différentes, de plus en plus nombreuses."

Extrait d’un rapport sur la Langue Internationale rédigé par le professeur Théopohile Cart et adressé au Ministère de l’Instruction publique le 3 septembre 1907. Envoyé par le gouvernement pour enseigner les Lettres à l’Université d’Uppsala (Suède) en 1891-92, président de la Société de Linguistique de Paris, polyglotte (7 langues), professeur au Lycée Henri IV (1892-1921) et à l’École des Sciences Politiques à partir de 1893, Th. Cart découvrit l’espéranto en 1894 mais ne l’apprit qu’en 1901. Il en devint dès lors l’un des plus fermes et brillants défenseurs.

1982 :
Rapport Bertaux  : "Nos élèves sont, à 99%, incapables de faire une phrase de leur cru, incapables de lire un article de journal, incapables de s’entretenir avec un camarade de leur âge dans sa langue."

1992 :
Le rapport de l’Inspection générale de l’enseignement constate que "l’hégémonie de l’anglais pose problème". Les résultats ne sont pas à la mesure de l’effort fourni : "Toujours heureux de pouvoir répondre à des questions par des bribes d’énoncés ou des mots isolés, les enfants sont plus rarement capables de faire des phrases complètes. En définitive, le gain le plus net et le plus durable semble être d’ordre psychologique plutôt que linguistique. "

1995 :
Rapport n 73 de la commission du Sénat sur l’enseignement des langues : "situation alarmante".

Pour une pédagogie du succès

"Le système scolaire n’est pas en mesure de produire des élèves bilingues ou trilingues", a reconnu M. Jean Favart, inspecteur général de l’éducation, lors d’un entretien accordé au Monde de l’Éducation (juin 1991).
Or, puisque le système révèle de telles insuffisances, n’y a-t-il pas lieu de s’interroger lorsqu’en plus il conduit à un taux élevé d’échecs scolaires et d’illettrisme, lorsqu’il engendre l’aliénation culturelle et l’altération de la langue maternelle en plus de l’exclusion ?

Dans un rapport du 28 juin 1922 intitulé L’espéranto comme langue auxiliaire internationale, le secrétaire général adjoint de la Société des Nations, Inazo Nitobe, avait déjà pu constater l’existence d’une autre voie dont les gouvernements n’ont tenu aucun compte : "On peut affirmer avec une certitude absolue que l’espéranto est de huit à dix fois plus facile que n’importe quelle autre langue étrangère et qu’il est possible d’acquérir une parfaite élocution sans quitter son propre pays".
L’espéranto est de ce fait la seule langue permettant à tout élève de bénéficier d’un réel enseignement bilingue dans le cadre scolaire. Il se voit doté d’une langue qu’il peut utiliser dès la première année d’étude pour des échanges internationaux, sans être lié au seul pays dont il apprend la langue ni à sa seule manière de vivre, de voir le monde et de penser. Loin de surcharger les programmes d’enseignement, il constitue à la fois une propédeutique qui ouvre la voie à l’étude des langues plus difficiles, et une orientation par laquelle le choix libre et diversifié d’une autre langue, actuellement inexistant, devient possible. L’élève connaît les satisfactions d’une communication enrichissante justement à un âge où il a soif de savoir et de découvertes.
Pour l’enseignant, c’est la satisfaction de voir le fruit de ses efforts durant la courte période qui le met en présence de ses élèves, même si ce n’est qu’une seule année scolaire.

L’enseignant et ses élèves sont ainsi libérés des frustra-tions de l’enseignement routinier traditionnel. C’est une expérience stimulante et enthousiasmante, et ceci se reflète sur l’esprit de la classe, sur la qualité de l’enseignement général. De plus, la découverte de l’espéranto et celle de son initiateur constituent la plus belle et la plus vivante des leçons qui soient de civisme planétaire, un civisme dont l’urgente nécessité ne peut échapper.
Grâce à l’espéranto, le gain auquel faisait allusion le rapport de l’Inspection générale de l’enseignement en 1992 est non seulement psychologique mais linguistique, pédagogique, propédeutique, pratique, civique. Le profit est donc réel, et ceci à moindres frais.

L’espéranto comme propédeutique

"En toute honnêteté, je dois reconnaître que ce n’est pas sans réticence que j’ai accueilli l’idée d’utiliser l’espéranto dans ma classe. Cette langue paraissait totalement inutile pour des enfants qui n’ont déjà pas trop de tout leur temps pour apprendre l’anglais. Or, nous avons fait l’essai et je dois avouer que les résultats ont été surprenants. ( ) Même si cet espéranto ne réussit jamais à devenir la deuxième langue dans tous les pays du monde, il a appris plusieurs choses importantes à mes élèves. Il a représenté pour eux une ouverture en ce qui concerne les langues étrangères. ( ) L’espéranto nous a beaucoup aidés pour l’analyse de la structure des phrases dans notre propre langue. ( ) Il a indirectement contribué à accroître le vocabulaire anglais ; en fait, pour certains élèves moins doués que les autres, cette augmentation du vocabulaire a été tout à fait considérable."
Mike Azevedo, Waianae Elementary School, Hawaï

"J’ai essayé, durant les horaires d’enseignement d’orienta-tion linguistique, de trouver des parallèles avec la langue allemande pour aider les élèves à connaître les structures de leur propre langue et pour les initier à la connaissance des structures linguistiques de base. Il s’est montré que les élèves d’origine turque, italienne, libanaise, bosniaque, croate, pouvaient puiser de leur propre langue des structures gram-maticales et quelquefois même des mots. De ce fait, les enfants étrangers étaient - autrement qu’à l’habitude - avantagés par rapport aux élèves allemands. Ceci a certainement accru la confiance en soi de quelques élèves.

Un autre de mes souhaits - en plus de faire connaître les structures linguistiques - était de procurer des contacts avec d’autres enfants à l’étranger. Nous avons commencé un échange de lettres avec une école élémentaire de Turin (Italie). En outre, nous avons poursuivi plusieurs chaînes de récits que nous avons fait suivre à l’étranger. Ces contacts ont été les plus agréables pour les élèves, comme l’ont raconté leurs parents. J’ai globalement l’impression que l’enseignement a non seulement apporté de bonnes expériences aux enfants et les aidera dans l’apprentissage des langues étrangères, mais aussi qu’il leur a plu."
Inès Frank,
École élémentaire d’Oberndorf/Neckar, Allemagne. Expérience réalisée avec vingt élèves qui ont suivi des cours d’espéranto à raison de moins de 80 heures pour toute l’année scolaire 1994-95. Extrait de Humankybernetik, publication de l’Institut de Cybernétique de Paderborn (Kleinenberg Weg 16b, D-33100 Paderborn, Allemagne).

DES LIVRES POUR COMPRENDRE

Livres disponibles au Service Librairie de SAT-Amikaro, 38, avenue de la République, 94320 Thiais. Ce service ne fonctionne que par correspondance, pour les adhérents. Catalogue contre 2 timbres.

 L’Espéranto. Pierre Janton. Paris : Presses Universitaires de France. Collection "Que sais-je ?", n 1511. Quatrième édition 1994. 128 p. L’auteur est professeur d’anglais à l’Université de Clermont II.
 Espéranto : l’image et la réalité. Claude Piron. Cours et études de linguistique contrastive et appliquée, n 66. Paris : Université de Paris VIII-Vincennes. 1987.
 L’Europe : Au rebours du bon sens ? Claude Piron. Paris : SAT-Amikaro. Brochure de 20 pages, format10x21 cm. 1992.
 Parlons espéranto. Jacques Joguin. Paris : L’Harmattan. 1998. 304 p.
 Communication linguistique - A la recherche d’une dimension mondiale. Claude Piron. Paris : SAT-Amikaro. 1992. 56 pages.
 Liberté ou autorité dans l’évolution de l’espéranto. François Lo Jacomo. Paris : l’auteur. 1981. 384 pages. Thèse de doctorat préparée sous la direction du Professeur André Martinet.
 Plurilinguisme et communication. François Lo Jacomo ; 24 co-auteurs. Paris : Société d’Études Linguistiques et Anthropologiques de France. Rapport du séminaire organisé à l’UNESCO par l’Association Universelle d’Espéranto (25-27 nov. 1985).
 Le droit à la communication directe par l’espéranto. Collection "Documents" du Nouvel Éducateur. Publications de l’École Moderne Française. 1992. 24 pages.
 La barrière des langues - Comment communiquer ? Collection Bibliothèque de Travail Jeunes, revue documentaire des 9 à 11 ans. Publications de l’École Moderne Française. 26 pages. 1992. Brochure réalisée par Thérèse Lefeuvre.
 Que vive la langue française, et que vive l’Espéranto ! Yvonne Lassagne-Sicard. Paris : Éditions Arcame. 256 pages (format 14x21 cm). 1993. L’auteur a été deux fois finaliste aux championnats d’orthographe de Bernard Pivot avec zéro faute en demi-finale.
 Le Défi des langues - Du gâchis au bon sens. Claude Piron. Paris : Editions L’Harmattan. ISBN 2-7384-2432-5. Étonnant, édifiant, remarquablement documenté. 336 pages. 1994.
L’homme qui a défié Babel. René Centassi, Henri Masson. Paris : Éditions Ramsay. Biographie du Dr Zamenhof, l’initiateur de l’espéranto. 408 pages. Photos, graphiques, index. 1995. (épuisé : nouvelle édition en préparation)